BASTIA 1975 : LES SUITES D'ALERIA.
BASTIA 1975 : LES SUITES D'ALERIA.
 
Des forces de répression continuent d'affluer dans les ports et aéroports de l'ile.

Le 26 Aout, la police ,appuyée par l'armée, interpelle des personnes dans toute l'ile.
 
Beaucoup d'innocents son déportés puis relâchés sur le Continent, ils devront regagner la Corse par leurs propres moyens.
 
Roland Simeoni est arrêté à Bastìa.
 
Toujours le 26 Pierre Susini est transféré à Paris (pour être incarcéré) contre l'avis de son chirurgien. Il a eu le pied arraché par une grenade.
 
La LDH (ligue des droits de l'homme) devra intervenir pour qu'il échappe à la prison.

Le 27 Aôut 1975, à Bastìa, les responsables de l'ARC tentent de calmer les jeunes.
 
La ville est assiégée par les CRS.
 
Soudain un ferry accoste, il vomit des centaines de gendarmes mobiles et des engins militaires;la tension monte d'un cran.
 
Quelques incidents éclatent.
 
Le sous préfet Guerin ordonne aux CRS de patrouiller aux alentours de la Place Saint Nicolas.
 
Les CRS se montrent méprisant et il en payeront le prix.
 
Voici un extrait du piège d'Aleria écrit en 1975 qui en dit long:
 
"Les CRS ne se font pas prier. 
 
Quelques uns se conduisent comme des voyous.
 
Ils interpellent les passants depuis les camions et leur crient: "Nous allons violer vos femmes."
 
D'autres lancent des grenades lacrymogènes dans les bars et ferment les portes.
 
D'autres encore attendent la sortie des clients aveuglés pour les matraquer.
 
Quelque chose doit clocher dans l'enseignement de police donné à ces gentlemen.
 
Un photographe de l'express est frappé à coups de crosse.
 
L'affrontement devient soudain beaucoup plus grave.
 
Et bientôt des coups de feu éclatent.
 
Les CRS ,tout à coup affolés -ils sont la plupart très jeunes- reculent dans une panique totale.
 
Quand ils recevront l'ordre de se servir de leurs mousquetons,
 
ils ne sauront même pas,dans la nuit,d'où partent les coups.
 
Une douzaine sont légèrement bléssés.
 
L'un d'eux est tué."

Les CRS apeurés se retranchent dans le hall de la préfecture, les gradés arrachent leur galons par peur d'être pris pour cible...
 
Bastìa ce soir là a été libéré, les autorités françaises se sont rendu! 
 
Mais la révolte n'est pas organisée et il n'y a personne a qui se rendre.
 
C'est le peuple corse qui spontanément est descendu armé dans la rue pour répondre aux agressions qu'il subissait.

Le 28 Aout au matin Bastìa se réveille assiégé, des auto-mitralleuses quadrillent la ville.
 
Les personnes se rendant au travail sont arrêtées sans ménagement et fouillées.
 
Les forces de répression n'hésitent pas à insulter et humilier les corses.
 
Une jeune femme s'entendra dire que toutes les corses sont des putains.
 
La haine bouillonne sous les casques vide.

Au milieu de la journée, on se sait pas trop pourquoi, les forces de répression disparaissent.

Serge Cacciari, un jeune Bastiais, est accusé d'avoir tué le CRS (sans preuve réelle).

Toujours le 28 le ministre de l'intérieur, Poniatowski, décide d'envoyer à Bastìa des tireurs d'élite de la brigade antigang.
 
A Paris on apprend que Edmond Simeoni risque la peine de mort ou la réclusion a perpétuité pour l'affaire dite d'Aleria.

Des opérations militaires se déroulent en Corse à la recherche des militants d'Aleria.

Le 1 Septembre à l'appel de la FDSEA et du CAR (comité anti répréssion) une manifestation à Ghisunaccia demande la libération d'Edmond Simeoni et expose la vérité sur les faits d'Aleria.
 
Elle réunira 5000 personnes et se déroula dans le calme.
 
Ce jour une opération Isula Morta (ile morte) est organisée.
 
L'écrasante majorité des magasins, bars, restaurants, restent fermés en signe de protestation.

Voici la réaction d'Edmond Simeoni depuis sa prison à ces signes de solidarités:

"Je viens d'apprendre par la radio le succès de la grève de solidarité déclenchée par le peuple corse ce lundi 1er septembre 1975.

Elle ne nous surprend en aucune façon, car le peuple sait qu'avec mes frères de lutte, à l'exclusion de toute préoccupation partisane et ambition personnelle, je n'ai jamais eu depuis dix ans et je n'aurai jamais d'autre souci que de le sauver, de garder intacte sa personnalité, de lui rendre ses biens aliénés et sa culture, de promouvoir la corsisation des emplois et le retour des exilés et surtout de lui restituer sa dignité par l'instauration, enfin, d'une vie authentiquement démocratique.

Notre action se situe sans équivoque au sein de la République française.

Pas plus les solutions à base d'économisme (mission Libert Bou) que des solutions terroristes ou militaires ne sont viables.
 
L'heure est à la lutte intense, responsable, en évitant soigneusement toutes manifestations dangereuses dans le climat actuel et permettant de surcroît toutes les provocations.

Je me suis déjà incliné devant les innocentes victimes des drames récents.
 
Mais, si j'assume toutes mes responsabilités, j'entends voir situer sans complaisance celles de l'État, historiques et conjoncturelles.

Par ailleurs, je désavoue par avance ceux qui exigeront ma libération et celle de mes camarades par des meurtres et des prises d'otages, et je refuserai toute éventuelle tractation induite par ces méthodes.
 
Mon attitude n'est dictée par aucun souci d'atténuer mes responsabilités, ni par aucune promesse officielle ou officieuse en ce sens.

Elle est dictée par le simple bon sens et la dignité.
 
Je suis trop moralement conscient de la justice de la cause du peuple corse, et de ce fait je n'ai peur ni de la justice coloniale, ni de ses sanctions même les plus extrêmes.

Le peuple corse conserve suffisamment de ressources en lui-même et de mes frères militants en liberté pour mener à bon terme sa lutte pour l'émancipation et la justice."

Edmond Simeoni reçoit des signes de soutien de la corse entière, de la diaspora et même de l'étranger.
 
Max Simeoni donnera des conférences en Corse et sur le Continent, partout il sera bien reçu.

Le 14 septembre on note quelques incidents entre corses et CRS lors d'une manifestation à Aleria.

Le 20 septembre à Corti, un gradé de la gendarmerie mobile arrache le drapeau corse placé sur la statue de Pasquale Paoli.
 
La ville entière èxige que le responsable vienne publiquement remettre le drapeau à sa place.
 
La gendarmerie et le ministère des armées refuse, soit disant le coupable aurait quitter la Corse.
 
C'est finalement le sous préfet de Corti qui rendra le drapeau au maire de Corti, sur la place Paoli noire de monde.

Le 12 Octobre le CAR lance l'action Bandera Corsa (drapeau corse) en demandant aux maires de mettre le drapeau corse sur le fronton des mairies.
 
Le préfet Riolacci leur suggérera d'y associer le drapeau français.
 
L'opération est un succès.
 
Depuis les mairies de corse arborent le drapeau corse aux cotés du drapeau français et parfois européen.

L'affaire d'Aleria porte ses fruits:

Extrait du livre le piège d'Aleria de Lucie et Edmond Simeoni éd JC Lattès:

"Le gouvernement, d'ailleurs, s'empresse de tresser lui-même des couronnes à Edmond Simeoni et à ses camarades.
 
Il propose, dès le lendemain d'Aleria, des mesures jugées impossibles quelques jours plus tôt, comme la création d'une S.A.F.E.R. ;
il fait désigner un juge d'instruction dans l'affaire du scandale financier;
il nomme en Corse des hauts fonctionnaires corses;
il met en marche un règlement du problème des transports;
il transfère aux assemblées régionales corses la gestion du fonds d'expansion constitué avec l'argent des Corses mais géré jusque-là par les ministères parisiens;
le président de la République prend la plume pour demander à Chirac de s'occuper un peu plus sérieusement de la Corse.
 
« On s'occupera même de supprimer le vote par correspondance ... »
 
D'accord, tout cela n'est sans doute qu'un feu de paille, ou un os à ronger, comme on voudra.
 
Ce n'est pas très important, ni même, peut-être, très sérieux.
 
Mais jusqu'à Aleria il n'avait jamais été question de ces mesures, depuis longtemps demandées et toujours refusées.
 
Or, si l'État se croit obligé d'accomplir ces gestes, ce n'est tout de même pas parce qu'une poignée d'assassins et de criminels a occupé deux jours à Aleria la cave d'un honnête commerçant..."
 
Source : jeanfred2a.skyrock.com
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