Soldat, officier et commandant de la Garde corse en 1656. La Corse militaire. Paul d'Ornano.

Soldat, officier et commandant de la Garde corse en 1656. La Corse militaire. Paul d'Ornano.

LOUIS XIV OBTIENT LA DISSOLUTION DE LA GARDE CORSE DU PAPE. 

 

L’AFFAIRE DES GARDES CORSES.


(20 août 1662-12 février 1664)

L’incident de la garde corse est bien connu ; on sait moins en revanche qu’il lança la première campagne de propagande du règne personnel de Louis XIV.
 
 
Portrait d'Alexandre VII, 1667 Baciccio Musée de Sofia

Portrait d'Alexandre VII, 1667 Baciccio Musée de Sofia

Cardinal Flavio Chigi, by Jacob Ferdinand Voet

Cardinal Flavio Chigi, by Jacob Ferdinand Voet

Quelque temps plus tôt, un malfaiteur avait été arrêté dans les jardins de la villa du cardinal Rinaldo d'Este par les gardes corses sur ordre du cardinal Flavio Chigi, le propre neveu du pape Alexandre VII.
 
Fort courroucé, Rinaldo d'Este fait appel à des ministres étrangers à des fins d’arbitrage.
Charles III de Blanchefort-Créquy (1623 ou 1624-13 février 1687), Prince de Poix, Duc de Créquy,

Charles III de Blanchefort-Créquy (1623 ou 1624-13 février 1687), Prince de Poix, Duc de Créquy,

 
 
C'est ainsi que le duc Charles III de Créquy est envoyé par Louis XIV comme ambassadeur extraordinaire pour régler le conflit entre le cardinal et les gardes du pape.
Il était alors accompagné de plusieurs soldats. 
 
Pourtant, le point de départ de l’affaire est simple, presque banal dans le cours des événements romains :
- le 20 août 1662, vers vingt-trois heures, une querelle éclate entre un domestique français de la reine Christine de Suède, et un garde corse (garde pontificale depuis le XIVe siècle).
 
Poursuivi, le Français se réfugie vers les écuries du Palais Farnèse, résidence de prestige prêtée par le duc de Parme à la France.
 
Dans ce quartier où il est assuré de bénéficier de la franchise liée aux quartiers des ambassadeurs, il obtient le soutien des palefreniers du duc Charles III de Créquy,, ambassadeur extraordinaire auprès du pape.
 
Mécontents d’avoir été repoussés, les Corses vont à leur quartier chercher du renfort, et c’est toute la compagnie en ordre de bataille qui marche, officiers et étendard en tête, en direction du Palais Farnèse.
 
Devant tout ce tumulte, le duc de Créquy, qui venait de rentrer par un autre côté du Palais, ordonne à quelques gentilshommes de sa suite, de repousser l’assaut ; mais sitôt sortis, ces derniers essuient plusieurs coups de mousquet, faisant un mort.
 
Les Corses occupent ensuite toutes les avenues du Palais.
 
Le duc de Créquy s’avance à un balcon pour apaiser les troubles de sa seule présence :
- peine perdue, il reçoit lui aussi plusieurs coups de feu qui ne l’atteignent pas mais l’obligent à battre en retraite.
 
Un peu plus tard dans la nuit, c’est au tour de la duchesse de Créquy d’essuyer à son tour quelques coups de feu tirés contre son carrosse, tuant un de ses pages et blessant un de ses laquais.
 
 
 
 
Rinaldo d'Este (1618 - 30 septembre 1672 à Modène) fut un cardinal italien issu de la Maison d'Este. (Gonzaga Collection )

Rinaldo d'Este (1618 - 30 septembre 1672 à Modène) fut un cardinal italien issu de la Maison d'Este. (Gonzaga Collection )

Du côté français, le récit précise qu’elle était à demi-morte et qu’elle trouva refuge chez le cardinal d’Este ( Renaud d’Este (1618-1673), justifiant dès lors la qualification d’« assassinat » contre sa personne et celle de l’ambassadeur qui, rappelons- le, désigne, dans le langage du Palais, les « mauvais traitements et insultes qui ont été faites à quelqu'un à main armée, et avec avantage, quoy que la mort ne s'en soit pas ensuivie » (Furetière).
 

L’attaque à main armée ne s’arrête pas là, les Corses reçoivent l’appui des sbires (police romaine) et ensemble, ils assiègent le Palais Farnèse, avec l’ordre apparemment, de tirer sur les Français :

- un sbire tire un coup de mousquet dans le ventre d’un des gentilshommes du duc.

Un des laquais du duc est également blessé.

 

 
 
Marquis Pompeo Frangipani, maréchal de France sous Louis XIII et membre de cette famille, inventa un parfum à base d'amandes avec lequel il parfumait ses gants. Son pâtissier s'en servit plus tard pour parfumer sa crème, nommée alors crème frangipane

Marquis Pompeo Frangipani, maréchal de France sous Louis XIII et membre de cette famille, inventa un parfum à base d'amandes avec lequel il parfumait ses gants. Son pâtissier s'en servit plus tard pour parfumer sa crème, nommée alors crème frangipane

Le marquis Frangipani accouru pour la défense du Palais en compagnie de sept ou huit Allemands ou Italiens, est également attaqué.

Le Palais est investi et bloqué par les soldats du pape pendant près de trois heures.

À la gravité de l’incident s’ajoute donc l’attitude pour le moins ambiguë des autorités romaines chargées du maintien de l’ordre.

Hugues de Lionne, Estampe de Larnessin en 1664

Hugues de Lionne, Estampe de Larnessin en 1664

Cette affaire a fait l’objet de nombreux récits concordants rédigés dès le lendemain de l’attentat :
- lettre du duc de Créquy au roi, datée du 21 août ,
- lettres des cardinaux de la faction française comme celle du cardinal Albizzi, à Hugues de Lionne du 21 août,
- lettre de Créquy à Hugues de Lionne du 22 août ,
- lettre de Créquy au roi, du 12 septembre , etc.
Celio Piccolomini     Né en 1609 à Sienne 24 mai 1681: Celio Piccolomini 20px-State_flag_simple_of_the_Grand_Duchy_of_Tuscany.svg Grand-duché de Toscane  Décédé le 24 mai 1681 à Sienne 24 mai 1681: Celio Piccolomini 20px-State_flag_simple_of_the_Grand_Duchy_of_Tuscany.svg Grand-duché de Toscane   homme d'Église italien  Créé cardinal par le pape Alexandre VII lors du consistoire du 14 janvier 1664   Consécration épiscopale 29 octobre 1656 par le cardinal Giulio Sacchetti

Celio Piccolomini Né en 1609 à Sienne 24 mai 1681: Celio Piccolomini 20px-State_flag_simple_of_the_Grand_Duchy_of_Tuscany.svg Grand-duché de Toscane Décédé le 24 mai 1681 à Sienne 24 mai 1681: Celio Piccolomini 20px-State_flag_simple_of_the_Grand_Duchy_of_Tuscany.svg Grand-duché de Toscane homme d'Église italien Créé cardinal par le pape Alexandre VII lors du consistoire du 14 janvier 1664 Consécration épiscopale 29 octobre 1656 par le cardinal Giulio Sacchetti

À partir de ce fonds d’informations destinées au roi et à son ministre, une version a été concoctée à l’intention du public et diffusée par la Gazette, treize jours après l’événement.
 
Le pape ne réagissant pas, Louis XIV ordonne à l'ambassadeur de quitter Rome et éloigne de Paris le nonce apostolique Celio Piccolomini :
- c'est quasiment la rupture diplomatique.
 
Le parlement d'Aix décide l'annexion d'Avignon, alors possession papale, au royaume de France.
 
 
Le 12 février 1664 intervint un accord, le traité de Pise.
 
Le gouverneur de Rome doit se rendre à Paris pour fournir des explications, la garde corse est dissoute et une pyramide édifiée à l'endroit où l'attentat avait été commis.
 
Enfin le légat pontifical, le cardinal Chigi, vient s'excuser publiquement devant Louis XIV le 29 juillet 1664.
 
À la suite de quoi la France rend Avignon au pape.
Monument à Rome commémorant l'affaire de la Garde corse en 1662, 1664-1668

Monument à Rome commémorant l'affaire de la Garde corse en 1662, 1664-1668

Sur la pyramide, une inscription latine déclare la nation corse :
« inapte et incapable de servir le siège apostolique »
 
La pyramide est détruite quatre ans après son édification sur ordre du pape Clément IX.
 La tapisserie L'Audience du légat.

La tapisserie L'Audience du légat.

 
 
Ainsi, du souvenir de cette histoire ne subsiste plus que la tapisserie L'Audience du légat, un tableau dans la Galerie des Glaces et une plaque de bronze au Musée du Louvre.
 
Restent également, en souvenir de cette affaire, des médailles qui ont été frappées le jour de la construction de la pyramide, de sa destruction et une dernière pour l'Audience du pape.
 
 
 
Source : Extrait de l'ouvrage : L’Incident diplomatique (XVIe-XVIIIe siècle)

Sous la direction de Lucien Bély et Géraud Poumarède

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