SANT'ANTONE DI I CHJARASGI.
SANT'ANTONE : UN SAINT PROTECTEUR.
• Les bergers corses, comme tous les Corses en général, honorent deux saints nommés Antoine (Antone).
Le premier est fêté le 17 janvier, c’est Saint Antoine l’Ermite, ou Saint Antoine Abbé, affublé d’un cochon à ses pieds.
Il est nommé en Corse : Sant’Antone di u porcu ou Sant’Antone di mezu ghjenaghju (Saint Antoine de la mi-janvier), Sant’Antone u Rimitu (Ermite), il ouvre la période de Carnaval.
SANT'ANTONE DI I CHJARASGI.
• Le second Saint Antoine est célébré le 13 juin.
C’est Saint Antoine de Padoue, qui est souvent représenté avec un « cigliu » ou « fiore di Sant’Antone » (lys blanc) à la main.
À Sartè une fleur jaune, « e càlendule » (le soucis), sert à confectionner des colliers.
Ils sont suspendus à la statue puis bénits et distribués aux fidèles.
• En Corse, le Saint Antoine du 13 juin est nommé « Sant’Antone di e chjarasge » (Saint Antoine des cerises) car est fêté au moment de la maturation des cerises.
Historiquement ils n’ont rien en commun mais les deux figures semblent souvent se confondre en une seule dans la dévotion des bergers corses.
• L’usage est de distribuer aux fidèles les petits pains bénits protecteurs « panucci, panioli » à la fin de la messe.
Les bergers ne partaient jamais en transhumance avant de se placer sous la protection de Sant’Antone.
Il ne fallait pas provoquer sa colère car le tonnerre qui gronde est un avertissement, les éclairs qui frappent et qui peuvent anéantir le troupeau, sont une punition.
« Beatu Sant’Antonu, francadeci dà a saetta è dà u tonnu » (Bénit soit Sant’Antone, protégez-nous des éclairs et du tonnerre).
• « Nunda andarà di male, i ghjorni di tempurale, si davant’a u tò purtone metti u pane di Sant’Antone ».
(Tout ira bien, les jours d’orage, si tu poses un petit pain de « Sant’Antone » sur le seuil de ta porte).
• Certains bergers portaient en permanence une petite statuette dans la poche.
Une partie d’un panucciu, paniolu (un petit pain) bénit le jour de la messe di Sant’Antone est donné à manger à la bête meneuse du troupeau, l’autre partie est conservée à la maison en signe de protection.
• Dans certains villages on allume toujours « u focu di Sant’Antone » la veille de la célébration.
Un autre rite accompli le jour de la célébration de « Sant’Antone di e Chjarasgie » par les bergers consiste à fabriquer « una orazzione » ou « raggione » (oraison).
La pointe d’une corne de vache était découpée puis un morceau de charbon du feu de Noël, une médaille pieuse, une feuille d’olivier des Rameaux ou une statuette étaient insérés dans la partie creuse.
Le bout de corne était ensuite bouché et accroché au cou d’une chèvre ou d’une brebis.
Ce rite païen, qui a été christianisé avec l’introduction d’un objet bénit, protégeait le troupeau des maladies et du tonnerre.
On invoque aussi Sant’Antone pour retrouver les objets perdus « u dispensoriu ».
Pierre Jean Luccioni.
(Texte extrait de l’ouvrage Pastori di Corsica, Usi Sacri è Prufani, éditions Piazzola, Aiacciu).