Le sac de Rome  - (Karl Pavlovich Bruillov) -

Le sac de Rome - (Karl Pavlovich Bruillov) -

LE PREMIER MOYEN ÂGE (VXISIÈCLESCONTINUITÉS ET CHANGEMENTS.

APRÈS LA CHUTE DE ROME 

LA CORSE ET LES GRANDES PUISSANCES MÉDITERRANÉENNES

Dans le courant du IVsiècle et durant la première moitié du Vsiècle, la domination romaine est mise à mal dans la plupart des provinces occidentales.

Les îles connaissent également des difficultés de relation avec l’administration centrale.

Elles deviennent alors des cibles privilégiées et forment des bases militaires faciles à contrôler qui peuvent servir de relais pour ceux qui les conquièrent.

Ainsi, vers 455, le roi vandale Genséric (399-477), installé depuis 439 à Carthage, intègre à son nouvel Empire la Corse, la Sardaigne et les Baléares.

Ces îles forment alors la province la plus septentrionale de l’Empire.

Les Vandales sont des chrétiens ariens.

Ils profitent de leur prise de pouvoir en Afrique pour piller les principales richesses, à commencer par celles de l’Église locale, récupérées dans ce dernier cas au profit du clergé arien ou celui des rois eux-mêmes et de leur proche entourage.

Il s’agit d’immenses terres cultivées ou des complexes religieux monumentaux les plus importants.

Ces spoliations entraînent une révolte de l’Église africaine.

Ses évêques les plus intransigeants et les plus prestigieux sont alors exilés, au moins à deux reprises, sous le règne du roi Huneric (roi de 477 à 484) et sous celui de Thrasamund (roi de 496 à 523), vers les zones désertiques du sud, vers la Sardaigne, la Corse et les Baléares.

En 532, les troupes byzantines reconquièrent les terres d’Occident provoquant l’effondrement du royaume vandale.

D’après l’historien Procope de Césarée (v. 500-550), le général Bélisaire (v. 500-565), placé par l’empereur Justinien (483- 565) à la tête de l’armée, obtient la reddition du roi vandale Gélimer en 534.

Il passe alors d’Afrique en Sardaigne puis envoie une partie de ses troupes occuper la Corse.

L’île est alors intégrée à l’Empire d’Orient et reste rattachée au diocèse administratif d’Afrique, au même titre que la Sicile et la Sardaigne.

Elle le restera jusqu’à l’occupation lombarde, généralement située vers la première moitié du VIIsiècle.

L’abandon de la Corse par Byzance présuppose qu’elle est effectivement passée sous la domination lombarde.

Pour le moins, ce désintérêt de l’empereur d’Orient pour l’île constitue une opportunité pour ce peuple puissant, qui contrôle déjà une grande partie de la Toscane vers 650.

La documentation écrite du siècle suivant est d’ailleurs révélatrice des liens étroits tissés entre la Lombardie et la Corse.

Néanmoins, la conquête politique ne semble pas avoir provoqué l’arrivée massive de colons.

Si on en croit les documents qui nous sont parvenus, les fiscs, c’est-à-dire les terres publiques administrées par l’autorité royale, sont rares.

On peut en déduire que la colonisation des terres est donc le fait de groupes dominants issus de centres urbains continentaux, notamment de Lucques et de Pise, privilégiant des intérêts privés. 

Étienne II (en latin Stephanus), consacré pape le 26 mars 752, mort le 26 avril 757

Étienne II (en latin Stephanus), consacré pape le 26 mars 752, mort le 26 avril 757

À la demande du pape Étienne II (752-757), qui s’appuie sur la donation de Constantin (donation qui s’est avérée être un faux, et rédigée à la demande du pape lui-même), Pépin le Bref fait la promesse en 754 de « restituer » au pape l’exarchat de Ravenne, de même que tous les territoires qui lui reviennent « de droit ».

L’engagement de Pépin, confirmé à plusieurs reprises par ses successeurs, a provoqué l’intégration de la Corse dans le temporel de l’Église romaine dont l’empereur assure désormais la protection.

L’engagement de Charlemagne dans cette cause est déjà parfaitement exposé dans la lettre qu’il fait parvenir au pape Léon III en 795.

Donation de Constantin : acte, qui se révéla être un faux, par lequel l'empereur Constantin 1er donnait au pape un certain nombre de privilèges et de territoires, dont la Corse.

Si l’occupation lombarde ne semble plus constituer un obstacle majeur à la main mise sur la Corse, les attaques des mu- sulmans d’Espagne et d’Afrique du Nord se font particulièrement nombreuses à partir du début du IXsiècle et présentent une véritable menace pour le monde italique.

Rome est sévèrement touchée en 846.

Néanmoins, un grand nombre de Corses viennent y trouver refuge sous le pontificat de Léon IV (847-855) qui les installe dans la cité de Porto, à l’embouchure du Tibre.

La résistance carolingienne se révèle peu efficace malgré une surveillance accrue du littoral.

Plusieurs expéditions sont organisées pour chasser les Infidèles qui utilisent probablement l’île comme base de départ pour des attaques lancées sur les villes et les riches monastères de la côte occidentale italienne.

En 807, le connétable Burchard, premier officier assurant le commandement des armées carolingiennes coule treize vaisseaux sarrasins aux abords de la côte orientale de l’île.

En 825, Lothaire Ier (795-855), roi des Francs et des Lombards, affirme clairement une politique impériale antimusulmane, destinée à protéger la Corse et le littoral nord occidental de la péninsule italienne.

Mais les résultats de ces opérations sont éphémères.

Elles sont intensifiées les années suivantes et afin de les pérenniser, de nouvelles charges publiques sont créées.

En 828, Boniface II (documenté de 823 à 838), comte et duc de Lucques, est chargé de la défense des côtes de l’Empire et reçoit le titre de praefectus de Corse.

Son fils Adalbert I (documenté de 846 à 884), lui aussi comte et duc de Lucques, marquis de Tuscia, porte dès 846 le titre de marquis et tuteur de la Corse (marcensis tutores Corsicana) ainsi que de défenseur du patrimoine de Saint-Pierre.

Il exerce ainsi un contrôle militaire et administratif sur la Corse qui se trouve désormais pleinement intégrée à la grande marche de Tuscia.

Tuscia : la marche de Tuscia correspond approximativement au territoire actuel de la Toscane, d’une grande partie de l’Ombrie et du nord du Latium.

Bérenger II, roi d'Italie.

Bérenger II, roi d'Italie.

Ce lien trans-tyrrhénien est surtout justifié par des impératifs militaires.

La Corse, grâce à sa situation géographique, acquiert un rôle stratégique et devient alors une marche-frontière entre le monde chrétien et musulman.

La défense de l’île reste précaire.

Toutefois, la Corse connaît un calme et une sécurité relatifs car à partir de la fin du premier tiers du Xsiècle et jusqu’aux environs de l’an mil, les expéditions sarrasines se font plus rares quand elles ne cessent pas complètement.

La raison en est l’ouverture de relations commerciales entre les mondes chrétien et musulman.

Durant cette phase de paix relative, le roi d’Italie Berenger II (v. 900-966) crée de nouvelles divisions territoriales dans le nord de la péninsule italienne.

Oberto Ier, documenté comme comte de Luni (Luni : ville romaine située dans le golfe de la Spezia, en Ligurie actuelle. de 945 à 948 et mort avant 975, reçoit vers 950 le titre de marquis et exerce une autorité sur les comtés de Tortone, Gênes et Luni auquel était semble- t-il administrativement rattachée la Corse.

Ce qui lui confère de ce fait, une autorité, une responsabilité militaire et politique en Corse.

On peut en déduire qu’à partir de 950, la Corse ne dépend plus de la marche de Tuscia, mais de celle d’Oberto et de ses descendants directs, les Obertenghi, qui joueront un rôle essentiel dans l‘instauration de la féodalité insulaire au début du second Moyen Âge.

Source : Le Moyen Âge en Corse.

Sous la direction de Daniel istria Chargé de recherche CNRS
UMR 7298 - LA3M - Aix-Marseille Université

avec la participation de :

Philippe Colombani, Professeur d'Histoire Géographie Lycée Lætizia Bonaparte - Ajaccio

Anne-Gaëlle Corbara, Doctorante en archéologie médiévale UMR 7298 - LA3M - Aix-Marseille Université

Aline Durand,  Maître de conférences UMR 7298 - LA3M - Aix-Marseille Université

Antoine Franzini Docteur en histoire médiévale

Élisabeth Pereira Maître de conférences Université de Corse

Émilie Tomas Docteur en archéologie médiévale

Nicoletta Usaï Docente a Contratto di Storia dell’Arte Medievale Università degli Studi di Cagliari

Préface Joseph Cesari Conservateur général du patrimoine et conservateur régional de l’archéologie et des monuments historiques à la Direction Régionale des Affaires Culturelles de la Corse

CRDP de l'académie de Corse

Édité par le Centre Régional de Documentation Pédagogique de Corse

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