ARMISTICE DE CASSIBILE.

ARMISTICE DE CASSIBILE.

CE QUE PRÉVOYAIT L’ARMISTICE DE CASSBILE ENTRE L’ITALIE ET SES ALLIÉS DU 3 SEPTEMBRE 1943 EN CE QUI CONCERNE LA CORSE (POINT 6).

Le texte du point 6 de l’armistice de  Cassibile est le suivant:

"Restitution immédiate aux Alliés de la  Corse et de tout le territoire italien, des îles et du Continent, pour leur utilisation comme bases d’opérations et à d’autres fins que les Alliés estimeront nécessaires".

Il est intéressant de noter que, dans le texte de l’armistice, la Corse est associée à l’Italie, car les Anglais et les Américains ne reconnaissent pas la Corse comme territoire français à ce stade, probablement en raison du rôle collaboratif joué par le gouvernement de Vichy envers les nazis.


Le caractère vague de l’armistice de Cassibile qui associait la Corse au Royaume d’Italie, passé du côté des Alliés alors que la République Française (Vichy) était encore alliée des Allemands, laissait espérer au Roi Victor-Emmanuel III de pouvoir tenir la Corse.

En raison de cet espoir, il envoya l’ordre au général Magli de liquider les troupes allemandes en Corse. 

Seule la fermeté et les menaces de De Gaulle firent sauter la tentative du Roi de conserver la Corse au Royaume d’Italie.

 

Source : Massimo Cogliandro à Alleanza antifascista per una Corsica federata con l'Italia

 
ARMISTICE DE CASSIBILE.

LE CONTEXTE :

Au printemps 1943, gravement préoccupé par le sort de la guerre, Benito Mussolini, chef du régime fasciste, opère une série de remaniements parmi les hauts dignitaires de l'État, destituant des personnages réputés proches du roi.

C'est à la suite de cet acte assez ouvertement hostile au Quirinal que Victor-Emmanuel III aurait rompu les atermoiements et débuté le projet de destitution du Duce.

À cette fin, Dino Grandi est approché, c'est un des dirigeants fascistes les plus intelligents et prestigieux, qui s'est déjà mis en évidence comme le seul véritable rival de Mussolini au sein du Parti national fasciste.

Parmi les médiateurs, on trouve le comte Pietro d'Acquarone , ministre de la Maison royale, et le maréchal Badoglio.

Grandi réussit à impliquer dans la fronde Giuseppe Bottai, autre hiérarque important qui soutient l'idée originale et              « sociale » du fascisme et qui œuvre dans les domaines de la culture, et Galeazzo Ciano, qui en plus d'être ministre et un hiérarque de premier plan, est aussi le gendre du Duce.

Avec eux, il prépare l'ordre du jour de la réunion du Grand Conseil du fascisme, le 25 juillet 1943, et qui contient l'invitation destinée au roi à reprendre les rênes de la situation politique.

Effectivement mis en minorité et arrêté, Mussolini est remplacé par le maréchal Badoglio.

La nomination de Badoglio est accueillie par une liesse populaire qui dure peu car elle ne signifie pas la fin de la guerre qui se poursuit au côté de l'allié allemand.

Mais, par différents canaux, des contacts avec les Anglo-Américains sont recherchés pour réactiver des négociations, déjà entamées par Marie-José de Belgique, belle-fille du roi, et qui bénéficient cette fois de son aval.

VERS LA SIGNATURE :

C'est à Lisbonne que Badoglio décide d'agir et le général Giuseppe Castellano  y est envoyé pour prendre contact avec les forces armées alliées.

Séparément, deux autres généraux sont envoyés au Portugal.

Déconcertés, les Alliés comprennent avec difficulté qui est leur interlocuteur, les trois Italiens s'abandonnant à une discussion sur leur qualité et la comparaison de leurs grades.

Castellano identifié comme le « vrai » envoyé, l'ambassadeur britannique Ronald Hugh Campbell  et les deux généraux envoyés dans la capitale portugaise par le général Dwight David Eisenhower, l'Américain Walter Bedell Smith et le Britannique Kenneth Strong, écoutent, sans bien sûr se compromettre, les propositions de reddition de Rome.

 

En réalité, cette proposition de reddition n'est pas accueillie avec enthousiasme, le sort des armées italiennes étant presque réglé ou en passe de l'être sur le champ de bataille, ce dont Rome est, depuis longtemps, convaincue.

La reddition offerte limite donc, en fait, les avantages que les Alliés pourraient obtenir par la conquête.

Le 30 août Badoglio convoque Castellano, rentré le 27 de Lisbonne.

Le général l'informe de la demande d'une rencontre en Sicile de la part de l’ambassadeur britannique au Vatican, D'Arcy Osborne, qui collabore avec son homologue américain Myron Charles Taylor.

Le choix de ce diplomate n'est pas le fait du hasard et signifie que le Vatican, au travers de Monseigneur Montini (le futur pape Paul VI) est impliqué dans les négociations diplomatiques.

LES POURPARLERS :

Badoglio demande à Castellano de se faire le porte-parole auprès des Alliés de certaines propositions : en particulier, Castellano doit insister sur le fait que l'Italie accepte l'armistice à la condition d'un important débarquement dans la péninsule.

Badoglio va jusqu'à demander aux Alliés d'être informé de leur programme militaire, oubliant un peu vite que jusqu’à la signature d'un armistice la guerre se poursuit et que personne ne révèle ses plans à l'adversaire.

Parmi les autres conditions demandées aux Alliés figure celle d'envoyer 2 000 parachutistes sur Rome pour défendre la capitale ; demande acceptée parce qu'en partie déjà prévue dans les plans alliés.

Le 31 août, le général Castellano arrive en avion à Termini Imerese et est emmené à Cassibile, dans les environs de Syracuse.

Le début de la réunion fait apparaître des points de vue différents : Castellano demande des garanties aux Alliés dans la crainte de l'inévitable réaction allemande à la nouvelle de l'armistice, en particulier qu'un débarquement allié ait lieu au nord de Rome avant même l'annonce de l'armistice.

Du côté allié, on répond qu'un débarquement en force et l'action d'une division parachutiste sur la capitale, autre demande de Castellano, ne pourraient se faire qu'avec, et non avant, la proclamation de l'armistice.

En soirée, Castellano rentre à Rome pour en référer.

Le lendemain, il est reçu par Badoglio.

À la rencontre participent le ministre baron Raffaele Guariglia et les généraux Vittorio Ambrosio et Giacomo Carboni.

Des positions divergentes apparaissent : Guariglia et Ambrosio indiquent que les conditions alliées ne peuvent être qu'acceptées alors que Carboni déclare que le corps d'armée qui dépend de lui, destiné à la défense de Rome, n'est pas en mesure de défendre la ville des Allemands en raison du manque de munitions et de carburant.

Badoglio qui ne s'est pas prononcé, est reçu par le roi Victor-Emmanuel III.

Celui-ci décide d'accepter les conditions des Alliés.

ÉVOLUTION DE LA SITUATION :

Un télégramme de confirmation est envoyé aux Alliés, celui-ci annonce l'envoi du général Castellano.

Le télégramme est intercepté par les forces allemandes en Italie qui soupçonnent déjà une telle éventualité.

Le commandant de la place de Rome se met à harceler Badoglio, malgré le serment et la parole d'honneur donnés pour démentir tous rapports avec les Américains.

En Allemagne, on commence à organiser des contre-mesures.

Le 2 septembre Castellano repart pour Cassibile, afin d'accepter au nom de l'Italie le texte de l'armistice.

Badoglio, qui ne souhaite pas que son nom soit en aucune manière associé à la défaite, cherche à apparaître le moins possible.

Il ne reçoit pas de délégation de signature, pensant alors que les Alliés ne réclameront pas d'autres documents écrits que le télégramme expédié le jour précédent.

Castellano contresigne le texte d'un télégramme rédigé par le général Bedell Smith qui est envoyé à Rome et dans lequel il est demandé les lettres de créance du général, à savoir l'autorisation de signer l'armistice pour le compte de Badoglio.

Celui-ci ne peut donc échapper à l'implication de son nom.

Le télégramme précise que sans de tels documents, les négociations seraient rompues, ceci naturellement, parce qu'en l'absence d'une accréditation officielle, la signature n'aurait engagé que Castellano et non le gouvernement italien.

Aucune réponse n'arrive de Rome, après quoi, en début de matinée du 3 septembre, Castellano envoie un second télégramme à Badoglio, lequel cette fois répond presque immédiatement en précisant que le texte du télégramme du 1er septembre constituait déjà une acceptation implicite des conditions d'armistice proposées par les Alliés.

De ce fait, il manque toujours la délégation de signature requise.

À 16h30, un nouveau télégramme est transmis par Badoglio qui contient l'autorisation explicite ce qui permet à Castellano de signer le texte de l'armistice pour le compte de Badoglio et qui informe que la déclaration d'autorisation est déposée auprès de l'ambassadeur britannique au Vatican, D'Arcy Osborne.

Ex-duce d’Italie Benito Mussolini pendant l’opération Oak,  a été sauvé par les Parachutistes allemands.

Ex-duce d’Italie Benito Mussolini pendant l’opération Oak, a été sauvé par les Parachutistes allemands.

LA SIGNATURE :

La réunion débute à 17 heures : Castellano appose sa signature au nom de Badoglio, et Bedell Smith au nom d'Eisenhower.

La réunion se termine à 17h30, aussitôt le général Eisenhower suspend le départ de cinq cents avions destinés à une mission de bombardement sur Rome.

Harold Macmillan, le ministre britannique détaché auprès du quartier général d'Eisenhower, informe immédiatement Winston Churchill que l'armistice est signé « […] sans amendement aucun ».

Les clauses de l'armistice définitif sont alors soumises à Castellano après avoir été présentées par l'ambassadeur Campbell au général Giacomo Zanussi, lui aussi présent à Cassibile depuis le 31 août et qui, pour des raisons peu claires, n'a pas informé son collègue.

Bedell Smith souligne que les clauses supplémentaires contenues dans le texte de l'armistice définitif dépendent de la collaboration italienne à la guerre contre les Allemands.

Ce même après-midi du 3 septembre, Badoglio réunit les ministres de la Marine, Raffaele De Courten, de l'Aéronautique, Renato Sandalli, de la Guerre, Antonio Sorice, ainsi que le général Ambrosio et le ministre de la Maison royale Pietro d'Acquarone.

Il ne fait pas allusion à la signature de l'armistice mais évoque simplement les négociations en cours.

Il fournit toutefois des indications sur les opérations prévues par les Alliés. 

Il aurait notamment parlé d'un débarquement prochain en Calabre, un autre plus important dans la région de Naples, et l'intervention d'une division de parachutistes alliés sur Rome qui serait soutenue par les forces italiennes.

Pietro Badoglio

Pietro Badoglio

LE 8 SEPTEMBRE 1943 :

Aux premières heures du 4 septembre, après un bombardement aéronaval sur les côtes calabraises, la 1re division canadienne et des détachements britanniques débarquent entre Villa San Giovanni et Reggio de Calabre ;

il s'agit en fait d'une diversion pour détourner l'attention des Allemands pendant que se prépare l'opération Avalanche, c'est-à-dire le débarquement à Salerne.

Celui-ci étant programmé pour le 9 septembre, les Anglo-Américains tiennent absolument à ce que les forces italiennes soient à cette date en mesure d'apporter leur concours.

Il faut pour cela que la signature de l'armistice soit publiée, que le revirement italien cesse d'être secret.

Deux émissaires américains, le général Maxwell D. Taylor et le colonel William T. Gardiner, se rendent à Rome pour sonder les intentions réelles des Italiens et leur capacité à soutenir effectivement l'intervention de parachutistes alliés sur Rome.

Dans la soirée du 7 septembre, ils rencontrent le général Giacomo Carboni, commandant en chef des forces italiennes pour Rome.

Celui-ci déclare que ses troupes ne sont pas encore en mesure de collaborer au raid aéroporté projeté et qu'il faut donc différer la publication de l'armistice, ce que confirme ensuite Badoglio, désireux de gagner du temps.

L'information est transmise à Eisenhower qui annule immédiatement l'opération des parachutistes (les avions avaient alors commencé à décoller).

Il décide de forcer la main aux Italiens en rendant unilatéralement public l'accord signé.

C'est ce qu'il fait le 8 septembre à 18 h 30.

Dwight D. Eisenhower

Dwight D. Eisenhower

LES CONSÉQUENCES DE L'ARMISTICE :

Les forces armées italiennes (environ deux millions d'hommes déployés en Italie mais aussi dans les Balkans, en Provence et en Corse) sont totalement prises au dépourvu.

Les officiers apprennent l’armistice sans pratiquement qu'aucune directive leur soit donnée sur la conduite à tenir.

À part quelques unités qui choisissent de passer ouvertement dans le camp allié (en particulier en Corse) ou qui décident de poursuivre le combat aux côtés des Allemands (elles vont former le noyau des forces de la République sociale italienne), l'appareil militaire dans son ensemble se désintègre en quelques jours.

Les forces allemandes présentes sur le sol italien, préparées à l'événement depuis la chute de Mussolini, lancent l'opération Achse qui leur permet de prendre presque immédiatement le contrôle de l'ensemble du territoire non encore occupé par les Anglo-Américains.

Les troupes italiennes sont désarmées, une grande partie est internée, le reste se disperse ou tente de rentrer chez elle.

Seule la Sardaigne et une partie des Pouilles restent sous contrôle militaire italien.

La marine de guerre italienne, qui est dans ses ports depuis près d'un an, doit se mettre à la disposition des Alliés et c'est ainsi que le convoi parti de La Spezia est attaqué par des avions allemands.

Vers 15 heures, le 9 septembre, un groupe de bombardiers allemands Dornier Do 217 s'attaque à la flotte sans lui infliger de dommages.

Les Allemands perdent un avion à cause des tirs antiaériens, mais quarante minutes après, un raid, qui utilise un nouveau type de bombe radiocommandée, provoque la destruction du Roma, orgueil de la marine italienne.

La famille royale et Badoglio quittent Rome à l'aube du 9 septembre, traversent en toute hâte la péninsule et arrivent le lendemain à Ortona, sur la côte Adriatique,la corvette Baionetta les emmène à Brindisi, derrière les lignes alliées, afin de se mettre à l'abri des Allemands et de leurs séides.

Tout l'appareil d’État s'effondre.

Operation Axis [Fall Achse]

Operation Axis [Fall Achse]

RÉACTION SOVIÉTIQUE : 

Staline fut furieux d'être évincé des négociations sur l'armistice italien et rejeta l'argument anglo-américain de l'urgence face à la situation italienne.

Il exigea un contrôle interallié tripartite des armistices à venir.

Cette exigence aboutit à la conférence de Moscou qui réunit entre le 18 octobre et 11 novembre 1943 les trois ministres des Affaires étrangères (britannique, américain et soviétique), prélude d'une série de rencontres entre les alliés.

Par la suite les alliés se mirent d'accord pour confier à des commissions la supervision des armistices mais où la décision finale reviendrait au commandant en chef allié sur place.

En pratique, Staline reconnaissait la prépondérance anglo-américaine sur l'Italie, mais pourrait, selon toute probabilité, se réserver l'essentiel des armistices portant sur l'Europe orientale et les Balkans.

Cette décision comporte en germe le partage de l'Europe et l'historien Georges-Henri Soutou considère cet épisode comme le point de départ de la guerre froide.

Source : Wikipedia.

 

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