© Theillet Laurent / MAXPPPP

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DANS LA MONTAGNE CORSE

Au milieu de la nuit, Sanvitus sortit chercher du bois.

Il se trouva nez à nez avec le ciel et conversa longtemps dans le silence avec lui.


Parfois, une étoile filante striait l'immensité à la vitesse de l'éclair pendant que les voix se ses compagnons lui arrivaient un ton plus bas, discourant encore sous le silence du ciel, parce que le langage est une forme d'infini que l'homme affectionne pour oublier qu'il est mortel.


Mais cet à priori sur son prétendu statut de mortel était renvoyé à son insignifiance, car les voix qui s'élevaient ici semblaient ne s'être jamais tues dans l'éternité des générations qui avaient vécu sur ce plateau, et qui avaient dressé les montagnes elles-mêmes à écouter leurs discours nocturnes sans lesquels les sommets alentour n'auraient pas eu autant conscience de leur force et autant de joie à l'offrir, à ceux qui parlaient et veillaient à leurs côtés pour leur rendre hommage.


Sanvitus retourna dans la bergerie et se permit de couper la parole à tout le monde parce qu'il venait d'être en contact avec le ciel et les sommets et que son discours devait être servi rapidement pour restituer dans toute sa plénitude l'imprégnation si fraîche et si récente dont il était porteur.


Il avait ainsi le sentiment de ramener du dehors la véritable parole de la montagne et du ciel corse, une parole qui ne devait en aucun cas être différée de crainte qu'elle ne s'humanise excessivement dans l'attente, ainsi que dans l'antichambre trop sélective ou trop discursive de son esprit.

Charles Versini.

Extrait du livre: « La Liberté Corse ».
Editions L'Harmattan.

Photo : © Theillet Laurent / MAXPPPP

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