AUGUSTINE.
Barbarella perdit son premier garçon et sa plus jeune fille.
Le petit garçon mourut à l’âge de trois ans.
On n’a jamais su de quoi.
C’était un enfant adorable. Souvent, il accompagnait son père lorsque ce dernier partait pour la propriété du Ghjarghjù.
Il allait jusqu’à la fontaine, plus tard jusqu’à la Maison Commune.
Le soir, il attendait son père, assis sur la murette de la route et revenait joyeux sur les larges épaules vers le logis familial.
Il mourut brutalement sans aucune maladie.
Jean-Dominique était rentré des champs, il avait ramené de l’orge.
Le petit enfant en réclama, son père lui en donna.
Le petit enfant tomba foudroyé par la mort.
Il s’appelait Dominique.
La dernière fille se prénommait Augustine.
Comme tous les enfants de Jean-Dominique et Barbarella, Augustine était une gamine superbe.
Un jour, alors qu’elle jouait avec les enfants du village, une méchante fille lui jeta un caillou.
Ce caillou avait dû être lancé très fort, car il blessa assez cruellement le genou de la petite Augustine.
La blessure fut soignée tant bien que mal, plutôt mal que bien.
Elle n’arriva pas à cicatriser, la plaie suppurait continuellement.
Augustine commença à boiter.
Le temps passait et la claudication de la pauvre Augustine se prononçait de plus en plus.
Dans les années 1930, son frère Pierre qui se trouvait à Marseille avec son adorable épouse, fit venir Augustine, afin qu’elle soit efficacement soignée.
On tenta une opération, qui s’avéra catastrophique.
On amputa la malheureuse enfant.
Pierre demanda à sa mère de venir de toute urgence.
Barbarella débarqua un dimanche matin.
Un cercueil aux ornements blancs était entreposé sur le quai.
Barbaredda frémit, se signa, murmura :
— Les pauvres parents…
Comment aurait-elle pu se douter que dans ce cercueil, reposait le corps de sa gentille petite Augustine ?
J’avais 11 ans, lorsque je partis pour Carbuccia afin de baptiser le fils de mon cousin germain.
En face de notre maison habitait une femme qui était la sœur du boucher.
Cette femme m’était antipathique.
Sans en connaître la cause, je ne pouvais m’en approcher.
La vue de cette créature me causait une sorte d’angoisse, un profond malaise…
Cette femme, je la détestais !
À mon retour à Marseille, je narrais cet étrange phénomène à ma mère.
Elle n’en fut pas surprise et devait m’apprendre que cette villageoise avait été la cause de la souffrance et de la mort de la petite Augustine.
C’était elle, qui avait lancé le caillou sur ma pauvre tante jolie, ma jeune tante chérie...
Monique Bellini. MBGC Editions