BUONARROTI LA CONJURATION DE CORSE.
Filippo Giuseppe Maria Ludovico Buonarroti, plus couramment appelé Philippe Buonarroti, né le à Pise (Toscane) et mort le à Paris, est un révolutionnaire français d'origine italienne.
Il né dans une famille de patriciens toscans descendant du frère du grand artiste Michel-Ange (Michelangelo Buonarroti).
La brochure de Buonarroti, sortie des presses en novembre 1793 à Paris, intitulée :«La Conjuration de Corse et divers mémoires sur la Trahison de Paoly, sur l’état de cette isle, et sur quelques moyens pour la ramener à l’unité de la République».
Buonarroti quitte sa Toscane natale pour rejoindre la Révolution française en septembre 1789 à Bastia, en Corse.
Il n’était pas un novice puisque dès 1786 il avait participé à la Gazzetta universale puis il avait fondé en 1787, toujours à Florence, le Journal politique (édité en français).
Partisan enthousiaste des idées des Lumières, il avait été inquiété pour la diffusion d’ouvrages de Voltaire et avait soumis un projet de réforme politique au Grand duc de Toscane.
En Corse, son action prend une forme différente.
Il est alors un politique, «un intellectuel qui organise».
Nulle discontinuité, au contraire: souvent (mais pas toujours) les hommes d’idées deviennent des hommes d’action avec la Révolution.
Il fonde le premier journal patriote de l’île en avril 1790 (Giornale Patriottico di Corsica).
En juin 1791, il est chassé par le parti clérical, puis il revient en Corse.
Avec la proclamation de la République, le procès du roi puis la guerre avec l’Angleterre, un conflit apparaît entre Buonarroti et Pascal Paoli, entre la révolution montagnarde et les paolistes.
L’ancien champion de l’indépendance de l’île pour toutes sortes de raisons (attachement à une monarchie libérale, son anglophilie, son passé de «père de la Patrie», ses convictions nationales corses) se détache de la République.
L’échec de l’expédition de Sardaigne (mars 1793) scelle cette rupture.
Il s’agit plus d’un prétexte que d’une raison.
Ici, les destins divergent définitivement.
Buonarroti choisit l’universel alors que Paoli choisit le particulier.
On peut noter succinctement quelques éléments de la polémique: la question de la bi-départementalisation de la Corse.
Buonarroti était en 1790 partisan d’un seul département.
Il ne s’agit pas d’un revirement en 1793 mais d’une modification politique: la «régénération» s’opère par le sommet de l’administration.
Si ce sommet est révolutionnaire, il faut le soutenir; s’il ne l’est pas, il faut le diviser.
Comme dans toute recherche sur Buonarroti, la question de la propriété privée –explicite ou non – est importante: il semble, au moins en lisant les textes de 1793, que Buonarroti soit à cette époque plus un «égalitariste» qu’un «collectiviste».
Il écrit: les Corses sont «accoutumés à l’égalité des richesses» ou «la communalité des biens semble garantir partout au pauvre le sentiment de son indépendance»; Buonarroti propose le retour des biens communaux spoliés mais cela ne semble pas argumenter dans le sens d’un communisme agraire.
Rousseauiste, il se plaît à citer les mœurs corses «la pitié filiale, l’amour conjugal, la pudeur, la bonne foi, la générosité, l’hospitalité et la sobriété».
Mais avec l’évolution «les anciennes vertus s’étaient réfugiés à l’ombre des châtaigniers et des sapins».
En l’an IV, il n’a rien oublié de son expérience corse: il se propose de représenter le département du Golo à la Convention nationale que les babouvistes devaient installer après la prise du pouvoir.
D’ailleurs, certains corses exilés à Nice étaient abonnés au Tribun du Peuple, journal de Babeuf.
Bien plus tard, en 1828, dans la Conspiration pour l’Égalité dite de Babeuf, il cite encore la Corse dans les exemples de peuples en armes ayant combattu victorieusement la tyrannie et quand il parle d’un peuple «agricole, simple et heureux» autant qu’une réminiscence virgilienne ne faut-il pas voir un rappel de «éloignez-vous de la maison simple du laboureur et du berger, et la vertu s’évanouit».
Relevons aussi l’anti-cléricalisme de Buonarroti: «mille moines mendiants et autant de prêtres dévastaient la Corse».
Quant à sa préoccupation pour l’éducation, elle éclate à chaque page.
Citons seulement «il n’y a en Corse d’autres bibliothèques que celles des couvents».
Source : Jean- Marc Schiappa. ahrf.revues.org
Philippe Buonarroti, La Conjuration de Corse, édition établie et présentée par Jacques Crozier. Éditions Centofani, Bastia, 1997.
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