PATTON ET JUIN EN MISSION SPÉCIALE EN CORSE.
PATTON ET JUIN EN MISSION SPÉCIALE EN CORSE.
PATTON ET JUIN EN MISSION SPÉCIALE EN CORSE.
 
 
 
Tous deux ont un ordre de mission spéciale signé d’Eisenhower, chef des opérations en Méditerranée.
 
Cette mission n’est pas pour déplaire aux deux hommes, car dépouillée de tout caractère officiel, elle présente l’attrait d’un voyage d’agrément.
 
« Je ne pouvais cependant pas trouver de plus agréable compagnon de voyage que ce géant pâle et blond qui ne se séparait jamais de son casque étoilé et de son colt et se donnait volontiers les airs d’un Buffalo Bill. » Dira J
 
Son armure de chef rude s’entrouvrait parfois pour laisser voir la part sensible de son âme.
Dans Ajaccio, première ville de France libérée, Patton et Juin s’empressent de féliciter le général Henry Martin qui a mené ses troupes à la victoire.
 
Le général américain commente à sa manière le rôle des patriotes corses :
« Il trouva aussi tout naturel que la guérilla corse, malgré sa vaillance, n’eût pu faire davantage.
On ne lutte pas contre des chars avec seulement des pistolets et des mitraillettes.
Mais il manifesta un profond étonnement quand on lui apprit que cette guérilla était organisée par cantons. »
 
Patton n’est pas au bout de ses surprises.
 
Chemin faisant, Juin lui révèle qu’il est Corse lui-même par sa mère, originaire d’Ucciani où une halte est prévue.
 
« J’avais fait prévenir la veille de mon passage en cet endroit et presque tout le village y était descendu. »
Devant la ferveur des embrassades scellant les retrouvailles, Patton s’étonne.
On lui explique. « Tout attendri, il sortit son Kodak, disant qu’il fallait absolument qu’il emportât un cliché de cette rencontre avec ma famille. »
 
Le lendemain au réveil, la mer avait retrouvé son azur, ce qui ne rendit que plus agréable la visite de Calvi.
 
Déjeuner dans les calanques de Piana, puis traversée de Cargese la grecque où Juin raconte à Patton l’histoire des migrants installés à Paomia.
 
Patton voue un culte idolâtre à Napoléon en qui il voit « le génie des génies. »
 
Il se fait un devoir de visiter la maison natale de l’Empereur.
 
 
« Devant le lit qu’on lui certifia être celui où s’était passé l’événement le 15 août 1769, on vit soudain Patton pâlir, puis s’agenouiller en proie à une intense émotion, et cela devant une assistance un peu surprise, mais sensible à un tel geste. »
 
Des observateurs américains rapportent que Patton à cet instant aurait caressé le couvre-lit impérial du bout des doigts en disant : « Just good for luck. »
 
En touchant le lit du héros, Patton en appelle à la chance, décidé à mettre ses pas dans ceux du vainqueur d’Austerlitz… aussitôt qu’Eisenhower lui en donnera l’occasion.
 
Le rêve passe.
 
Mais la réalité rattrape vite les deux généraux.
 
Le même avion ramène Patton et Juin à Alger.
 
Le général français rejoint l’Oranie où l’avant-garde de son Corps expéditionnaire se tient prête à s’embarquer pour Naples.
 
Quant au général américain, il rejoint la Sicile en attendant une nouvelle affectation.
 
Considérant le débarquement allié à Anzio exécuté sans coup férir en janvier 1944, Juin se demandera si sa virée en Corse avec Patton quelques mois plus tôt n’y entre pas pour quelque chose. Comment savoir ?
 
Mais pour l’historien Jean-Christophe Notin, ce voyage en Corse constitue « une ruse un peu grossière pour le stratège qu’est Kesselring qui, à n’en pas douter, connaît le relief tourmenté de l’île et son manque d‘infrastructures. »
 
Si les services secrets allemands n’ont pas été dupes de la manoeuvre des Alliés, les généraux Patton et Juin, conquis par l’hospitalité corse, en ont presque oublié les fureurs de la guerre.
 
Documents Settimana, Corse Matin.Par Jean-Pierre Girolami
Retour à l'accueil