Refus du ministre de l’Intérieur, pétition à l’Assemblée nationale
Le conseil de Bastia se propose par une délibération en date du 6 février 1842 de contribuer aux travaux pour une somme de 500 000 francs.
Cet impôt est bien accepté par la population, consciente de l’enjeu.
Dans un premier temps, le gouvernement donne son accord à cette initiative mais alors que la municipalité attend le feu vert législatif, contre toute attente, le ministère de l’Intérieur s’y oppose.
Ce refus, non fondé en droit, avait en partie sa source dans un sentiment légitime.
La France était atteinte par une grande calamité.
Les mauvaises récoltes de 1846 avaient produit une détresse générale.
Le gouvernement, rudement préoccupé de ce malheur public, avait été obligé de venir largement au secours des classes nécessiteuses.
Le moment lui paraissait inopportun pour proposer l’établissement d’un impôt sur les blés.
Ce cas peu banal d’une ville « s’imposant » un impôt pour réaliser de grands travaux n’est pas isolé, Marseille ayant reçu l’autorisation d’agir de même pour l’achèvement du canal de la Durance.
Soucieux de sortir de l’impasse, les habitants de Bastia adressent en avril 1847 une pétition au roi Louis-Philippe « suppliant le gouvernement de ne pas se préoccuper des circonstances calamiteuses dans lesquelles on se trouvait mais de leur donner un nouveau gage de sa bienveillance, en faisant disparaître l’obstacle inattendu qui retardait l’exécution d’une loi utile et nécessaire. »
L’autorisation de taxer les grains pour contribuer à la réalisation du port ne fut pas accordée, mais en janvier 1848, le ministre des Travaux publics donne l’ordre de mettre en adjudication les travaux du port de Bastia pour une somme de 600.000 francs.
Le préfet de la Corse était chargé de s’entendre avec le préfet des Bouches-du-Rhône pour fixer le jour de l’adjudication, qui devait avoir lieu à Marseille.
Mais, au moment où l’on s’occupait de l’accomplissement de cette dernière formalité, qui allait permettre d’exécuter l’importante construction du port de Bastia, la révolution de Février éclata et la solution de cette question, vitale pour notre pays, fut encore ajournée.
Il faudra attendre que la fièvre révolutionnaire retombe pour que la question du nouveau port de Bastia revienne à l’ordre du jour.
En juin 1848, les marins de Bastia et les Corses de Paris adressent deux pétitions à l’Assemblée nationale où, « faisant valoir avec énergie les raisons d’impérieuse nécessité et d’incontestable urgence depuis longtemps reconnues, ils sollicitaient l’exécution de la loi de 1845 et demandaient que la mise en adjudication des travaux du port de Bastia, suspendue par la révolution de février, fût de nouveau et promptement ordonnée. »
Cette détermination des Corses paya, car la délibération de la taxe fut enfin approuvée et soumise au Conseil d’État.
Le 24 janvier 1849, Louis Napoléon Bonaparte, président de la République, autorise l’établissement de la taxe sur le blé et la farine.
Les travaux du nouveau port sont alors mis en adjudication à Marseille le 30 août 1849. L’administration espère y dénicher l’entreprise capable de mener ces travaux à bonne fin.
Mais un nouveau grain de sable vient contrecarrer cette démarche... Antoine Fabiani.