EN 1890, LE PRÉSIDENT  SADI CARNOT  EST EN VISITE EN CORSE.
LA CORSE, ÎLE DE SAUVAGES ? 
EN 1890, LE PRÉSIDENT EST EN VISITE EN CORSE.
L'OCCASION DE RAPPELER QUE L'ÎLE EST CERTES ENCORE PEU DÉVELOPPÉE, MAIS PAS PEUPLÉE DE SAUVAGES... 

Au XIXe siècle, la Corse tente de moderniser son agriculture et de développer son industrie, mais les crises économiques liées aux maladies des troupeaux ou de la vigne, ainsi que les effets de la loi de 1818 qui taxait les produits exportés de Corse et détaxait les produits importés du continent, freinent considérablement son envol.

De grandes évolutions sont certes en cours - construction de routes, interdiction du libre parcours du bétail, installation du télégraphe et du premier courrier maritime postal, développement de l'industrie minière... - mais vue du continent, la Corse est une terre... de sauvages, comme l'écrit Le Petit Journal en 1890, à l'occasion de la visite du président Carnot sur l'île :

"On ne connaît pas assez, en France, ce pays magnifique, cette terre généreuse baignée dans une mer bleue, dans un ciel bleu, dans des vapeurs bleues, dans un azur infini. (...) La Corse est si peu connue qu'on semble croire que le président va faire une excursion lointaine, dans quelque île peuplée de sauvages, à Nouka-Hiva ou à Vanikoro. Pour un peu on se demanderait à Paris s'il est bien prudent de laisser le chef de l'État débarquer chez des insulaires pointilleux, qui ont toujours le fusil à la main, qui ne parlent que de vendettas, et prennent le maquis de temps en temps après avoir envoyé ad patres l'ennemi de leur famille."

L'auteur de l'article poursuit en expliquant :

"On ne trouve dans l'île ni progrès, ni civilisation. La diligence est le seul moyen de communication, après le mulet. Pour aller de Bastia à Ajaccio, il faut encore quinze heures. Aussi les Bastiais et les Ajacciais s'ignorent. Le sol est en beaucoup d'endroits fertile. On pourrait le cultiver et l'exploiter dans des conditions favorables, mais le chemin de fer manque, tout est là."

La solution, donc, est de développer les chemins de fer, insiste le journaliste, qui ne manque pas de rappeler le délaissement qu'a subi l'île des décennies durant :

"Ce qu'il faut à la Corse, pour l'assagir, pour la conduire au degré de prospérité des autres départements français, ce n'est ni le fusil du gendarme ni l'épée du préfet, c'est le rail. (...) Vous aurez une Corse industrieuse, en dépit du tempérament contemplatif ou fier de ses paysans. S'ils ne veulent exploiter leur terre natale, nous irons les aider, nous gens de France, et nous vivrons là, nous ferons peu à peu la conquête pacifique de l'île que l'indifférence des gouvernements depuis un siècle a laissée dans un état vraiment honteux."

Source : retronews.fr

Photo : Sadi Carnot à la Casa Bonaparte, où il s'attarde devant la chaise à porteurs de Letizia la mère de Napoléon.

L'Univers illustré 3 mai 1890. La corse des Présidents de Paul Silvani.


 

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