Buste d'Aristote. D’après Lysippe — Jastrow (2006)

Buste d'Aristote. D’après Lysippe — Jastrow (2006)


ARISTOTE : POURQUOI VIT-ON POLITIQUEMENT ?

Aristote fait ici la généalogie de la cité à partir du couple, et procède par complexification croissante jusqu’à la cité, communauté de toutes les autres.

Il montre bien que si les hommes s’associent en communauté, c’est parce qu’ils ne peuvent se suffire à eux-mêmes ; et que si aucune communauté ne pouvait se suffire à elle-même, alors, toute association serait futile et vaine.

1) la communauté de base de la cité est le foyer (communauté domestique, communauté naturelle constituée en vue de la vie de tous les jours).

a) la relation homme-femme : relation communautaire naturelle, car :

-relation mâle-femelle existe chez tous les êtres vivants;


-l’un ne peut exister sans l’autre : l’union n’est pas volontaire mais instinctive : cela signifie que l’un sans l’autre n’est pas complet ; seul le couple, ie, la communauté des sexes, permet à un animal d’être en soi, grâce à la procréation qui nous rend semblables en quelque sorte à Dieu;


-elle est ce sans quoi une fin ne pourrait être atteinte, à savoir, la procréation (finalité naturelle du couple) ; on a donc ici une nécessité biologique (s’il y a des couples, c’est donc parce que sans cela, l’espèce n’aurait pu survivre);

b) Le maître et l’esclave ou relation despotique.

Quelle est sa spécificité, ce qui la distingue du couple et de la cité?

-Pour cela, Aristote doit montrer qu’on a affaire à une communauté d’êtres incomplets et donc indispensables l’un à l’autre, telle qu’elle seule leur permette de réaliser une oeuvre commune, et distincte de toute autre.

-Le maître est celui qui par nature “commande”, ie, est capable naturellement de prévoir par la pensée.

L’esclave est par nature l’être capable d’exécuter physiquement les tâches conçues par le maître.

Donc, la même chose est avantageuse à l’un et à l’autre. Le maître commande donc légitimement à l’esclave...

-Mais cela signifie aussi que l’incomplétude naturelle de chacun les rend naturellement dépendants, à la fois de l’autre, et de leur oeuvre commune.

L’un et l’autre ont de plus besoin de l’autre en vue de la satisfaction de leurs besoins quotidiens, ceux auxquels pourvoit le foyer.

Le travail économique (de “oikos”, travail exercé dans le cadre privé pour satisfaire les besoins de la vie de tous les jours) est l’oeuvre propre de la communauté domestique, et donc, l’oeuvre commune au maître et à l’esclave.

Spécificité par rapport à la première relation.

c) il y a une autre partie de la famille, qui définira une autre relation de pouvoir, à savoir, le père et l’enfant.

Conséquence : il faut distinguer radicalement trois types d’autorité ou de pouvoir.

a) pouvoir politique (entre êtres libres et égaux) ;

b) pouvoir despotique (sur êtres non libres) ;

c) pouvoir royal (sur êtres libres et inégaux).

Dans la plupart des cas, c’est par nature qu’il y a un commandant et un commandé.

2) La communauté du village : elle est formée de plusieurs familles en vue de relations qui ne soient plus seulement celle de la vie quotidienne.


Le village est né une fois les besoins immédiats satisfaits, et afin de pourvoir à d’autres, qui sont l’administration de la justice et des cérémonies religieuses.

Le village est fait de foyers qui en sont les parties.

 

3) La communauté politique (cité).


-autarcique, autosuffisante : c’est la plus petite communauté qui suffit à pourvoir à tous les besoins de ses membres, à combler tous les manques.

Elle est, par là, la fin du développement historique par lequel les hommes se sont associés en communautés.

Mais l’autarcie est aussi sa propre fin : la cité n’existe qu’en vue d’elle-même.


-seule la fin de la cité est parfaite.

-l’homme ne peut être pleinement que dans et par la cité.

a) la cité existe naturellement, puisqu’elle est la fin du développement naturel. 

-autarcie : fin du développement naturel, car, toute communauté existant naturellement en vue de satisfaire certains besoins naturels, elles existent toutes en vue de celle qui les satisfait tous.

(1) La nature de toute communauté, est la fin pour laquelle elle existe
(2) la nature de toute communauté est hors d’elles (puisqu’elles ne se suffisent pas à elles-mêmes
(3)sauf celle de la cité qui est la nature de toutes les autres qui y tendent.

b) L’homme est naturellement politique.

Il y a dans la nature de l’homme une tendance à vivre dans des cités ; et, en réalisant cette tendance, l’homme tend vers son bien propre.

L’individu est inachevé, et il vit en cité, non par intérêt, mais pour y réaliser son bonheur. 


Si l’homme est un être naturellement politique, c’est donc parce qu’il est un être naturellement en manque.

Il vit en communauté pour être avec d’autres et être achevé et auto-suffisant.

La nature de l’homme, être parlant, montre qu’il est fait pour la vie politique et que la cité est bien un être naturel :


(1) la nature ne fait rien en vain

(2) seul de tous les animaux, l’homme a un langage (le logos) ie, une faculté d’exprimer ou de communiquer par concepts et propositions, et qui a un objet spécifique : les valeurs sociales en vertu de (1) il doit donc y avoir une raison de cette différence naturelle dans la nature même de l’homme

(3) cela montre donc que seul l’homme vit naturellement dans un milieu où il peut percevoir et communiquer les valeurs sociales : polis et logos ont donc partie liée dans la nature de l’homme..

On peut donc dire que la polis est la communauté de ceux qui communiquent leur perception du bien commun.

 

c) Antériorité de la cité.

En allant des parties au tout, on a renversé l’ordre réel.

Aucune de ses parties ne serait elle-même sans le tout, puisqu’aucune n’est auto-suffisante.

Les parties ne peuvent être sans le tout (ie : l’individu isolé n’est pas homme hors de la société politique : c’est une bête ou un dieu).

D’ailleurs, pour lui, un homme hors de la cité est pire que la pire des bêtes, parce qu’il est doté naturellement de dispositions intellectuelles qui compensent ses déficiences en moyens physiques d’auto-défense, et qu’elles sont les armes les plus redoutables sans l’éducation à la justice que donnent les lois de la cité.

L’homme, animal politique est le meilleur des animaux, et l’homme a-politique est la pire des bêtes...

 

L'HOMME ET LE CITOYEN OU :

QU'EST-CE QUI FAIT DE L'HOMME UN HOMME ? 

A- C'est l'appartenance à une cité, donc, la citoyenneté seulement

 

Ce qui fait de l’homme un homme c’est donc le lien social.

Ce n’est donc pas l’individualité qui fait l’humanité.

On n’est pas homme d’abord, puis membre d’une société.

On est l’un par l’autre.

L’idée même de « droit de l’homme » n’a donc ici aucun sens : celui qui a des droits, c’est le père de famille, ou bien tel ou tel citoyen en tant qu’il a une compétence particulière, mais on ne trouve nullement chez lui l’idée abstraite d’un homme en général qui aurait des droits parce que c’est un homme.

 

Source : philocours.com

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