Tout va très bien, Madame la Marquise
Tout va très bien, tout va très bien
Pourtant, il faut, il faut que l’on vous dise
On déplore un tout petit rien
Cette célébrissime rengaine de Ray Ventura s’adapte tant à la venue éclair d’Edouard Philippe en Corse! Accueil républicain à Bastia, visite de la citadelle d’Ajaccio, rencontre avec les maîtres nageurs sauveteurs de Propriano…
Si l’écurie brûla, Madame,
C’est que le château était en flammes
Mais à part ça, Madame la Marquise,
Tout va très bien, tout va très bien
Il est des évidences navrantes en ce bas monde qui méritent que l’on s’y attarde.
Le désastre écologique, le gaspillage alimentaire, la carrière sans fin de Michel Drucker…
Mais parmi toutes, l’attitude déplorable de l’exécutif en Corse reste l’une des plus incompréhensibles.
La mauvaise volonté de nos gouvernants à l’endroit de l’île et de son histoire reste une énigme à peu près aussi peu déchiffrable que l’âge véritable de Jeanne Calment.
De ma place de psychanalyste, je rencontre tous les jours des patients dont le symptôme est si secrètement utile qu’ils l’aiment plus qu’eux-mêmes !
Ils n’en démordent pas: ils viennent me voir, peut-être, mais ils ne souhaitent surtout pas guérir.
Je tente d’accéder à la raison profonde de leur malheur mais hop !
Ils me condamnent à l’impuissance en prétextant une énième petite misère et en ne voulant surtout pas s’atteler à la cause de leur désespérance.
En quelque sorte, ils sont amoureux de leur plainte et s’échinent à la conserver, par tous les moyens légaux.
La paranoïa systématique, les malentendus à répétition génèrent le mépris et l’incompréhension.
Y a-t-il seulement eu un geste de l’Etat français à proportion de la sincérité de Siméoni, au crépuscule de sa vie, lorsqu’il condamnait la violence et invitait à la paix?
Quand j’observe les manières maladroites, bredouillantes, tour à tour trop ou pas assez défensives, de la ribambelle préfectorale et gouvernementale en Corse, je ne peux m’empêcher de penser à ces patients enlisés dans leurs paradoxes.
Non que les solutions soient aisées –elles ne le sont jamais nulle part– mais la mauvaise volonté, la paranoïa systématique, les malentendus à répétition génèrent le mépris et l’incompréhension…
Les doléances nationalistes ne sont pas non plus des montagnes impossibles à surmonter.
Elles correspondent à une histoire largement audible.
Certaines ne sont peut-être pas applicables, mais aucune ne mérite une morgue princière digne de Giscard dans ses errements les plus monarchistes.